Violaine Dejoie Robin au château Monluc de Saint-Puy
Saint-Puy
A 12 km au sud-est de Condom, le village de Saint-Puy ne doit son nom à aucun saint du calendrier : c’est un avatar lointain du latin Summum podium, point culminant. Le peuplement en est fort ancien. La trace de la tribu gauloise des Garites se retrouve dans le nom du comté de Gaure, dont « Sempuy » fut la capitale. C’est un site défensif, autrefois ceint de remparts et dont la structure encore nettement visible aujourd’hui se décline en trois parties : le bourg castral, dans la partie haute (le « castel-dessus »), tout en bas le bourg ecclésial (ancien emplacement du « castel-Debas »), et entre les deux, une bastide de forme régulière datant sans-doute du XIIIème siècle. Porteur d’une histoire riche et mouvementée, le village, aujourd’hui fort paisible, surplombe magnifiquement la campagne qu’il protégeait autrefois.
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Le château Monluc
Au sommet du castelnau se dresse le château qui fut la demeure familiale de Blaise de Monluc, homme de guerre et écrivain du XVIème siècle, dont les célèbres Commentaires retracent ses campagnes contre les protestants. C’est vers le milieu du XVème siècle qu’il fut offert par Charles d’Albret à Pierre de Lasseran-Massencome, arrière-grand-père du brillant maréchal. Il s’élève sur l’emplacement d’un château médiéval détruit en 1272 par le Comte d’Armagnac, allié alors au comte de Foix, puis reconstruit sur l’ordre de Philippe le Hardi, roi de France. Souvent restauré et remanié, il fut l’enjeu de bien des conflits avant d’entrer au XVIIIème siècle dans la famille du propriétaire actuel, René Lassus. Ce dernier, perpétuant la tradition gasconne héritée des anciens romains, y développa un domaine viticole fort renommé. Il est l’inventeur du fameux cocktail « Pousse-rapière », ainsi nommé en hommage à Blaise de Monluc, qui avait ramené d’Italie et introduit en France cette lame fine, puissante et légère…
Le portail d’entrée s’ouvre au visiteur sur une allée délimitant deux espaces : à gauche, le château, sobre et élégant, regroupant les lieux d’accueil et d’habitation, avec son parc bien arboré ; à droite, une vaste esplanade herbue, bordée de remparts et battue par les vents, dont la nudité un peu sauvage contraste singulièrement avec la grâce des jardins. La vue partout y est grandiose. Tout ici évoque autant les fracas de l’histoire que la douceur de vivre : une harmonie lentement mûrie au fil des siècles.
Violaine Dejoie Robin
Vit et travaille à Nantes (Loire-Atlantique).
Née en 1952 à Paris, Violaine Dejoie-Robin fréquente très jeune l’Ecole des Beaux-arts de Nantes et entame rapidement un parcours d’une grande fécondité. La peinture y occupe d’emblée un rôle important, en parallèle avec une longue et abondante activité de cinéaste. Ces deux démarches, nourries l’une de l’autre, aboutissent à des créations surprenantes, à partir d’éléments picturaux traitées photographiquement : après les « arbres-écrans », sur panneaux de toile plastifiée, elle en vient à tisser sur de vastes grilles des images d’yeux ou de visages immenses, qu’elle installe au cœur d’un paysage.
Fascinée par la nature, elle expose partout en France et participe à de nombreux événements liés au Land Art.
Les yeux de Barbara ou ceux d’André Breton, le sourire de la Joconde, l’oreille de Van Gogh, chacun a pu les rencontrer dans des photos ou des tableaux, bien à leur place dans l’ensemble qui les contient. Les découvrir immenses parmi des arbres, frémissant au fond d’un parc ou reflétés dans un plan d’eau est une tout autre aventure. C’est celle que nous propose Violaine Dejoie-Robin dans ses créations les plus récentes.
Sa passion pour la peinture, sa longue expérience de cinéaste et son amour de la nature ont en effet trouvé leur convergence dans une pratique artistique totalement inédite. Captée au cœur d’un tableau et photographiée, l’image numériquement compressée devient canevas pour une autre tâche, qui s’apparente au tissage : ce sont les « Trames px », px comme pixels, bien sûr. Le support est un filet de pêche. Quant au matériau, c’est de la toile de spi de diverses couleurs découpée en fines lanières nouées patiemment point par point. Plus tard elle captera les moindres frissons de brise, mais comment ignorer qu’elle nous parle déjà de la mer et du vent?
Tendue sur un vaste châssis rectangulaire, l’image ainsi produite, et souvent multipliée, ne trouvera sa finalité que dans le morceau de nature destiné à la recevoir. Jardins, prairies, étangs s’animent d’une présence péremptoire et énigmatique, que le regard doit capter de loin pour en percevoir toute la force.
Violaine Dejoie-Robin est une amoureuse des arbres : elle les a souvent peints, toujours tentée de les restituer ou de les superposer à leur espace naturel. Elle en a reproduit l’image sur des bâches animées par le vent et traversées par la lumière. Mais avec ses panneaux tissés, c’est désormais la présence humaine qu’elle installe parmi eux. A nous de tendre l’oreille au muet dialogue qui en résulte.