Elise Morin à l’église Sainte-Germaine
Eglise Sainte-Germaine
Sur la route de La Romieu, en suivant le panneau « Chapelle du XIIe siècle », on traverse trois hameaux, dont celui de Baradieu et on découvre un clocher-mur triangulaire au-dessus d'un petit bois de chênes. C'est celui de la petite église romane de Sainte-Germaine. Passé le portail de bois, nous découvrons à gauche un espace arboré et à droite une plate-bande fleurie longeant le cimetière. Au bout de l'allée une énorme ouverture en plein cintre datée de 1730 nous invite à pénétrer dans une cour pavée ceinte de hauts murs : le caquetoire. Un porche à demi couvert d'une imposante charpente adossée au clocher-mur protège la porte de l'église des intempéries venues de l'ouest. Cette porte romane nous introduit dans ce lieu de prière qui était le siège d'une paroisse importante.
Hermana, la fille du seigneur des lieux fonda ici un monastère très vite florissant et prospère. Quand les Normands (ou les Sarrazins) « visitèrent » l'établissement sans ménagement, Hermana et ses sœurs, martyrisées, y perdirent la vie. Le monastère fut reconstruit au début du XIIe siècle et le nom de Santa Germana lui fut donné, transformé ensuite en Sainte-Germaine. Le monastère a disparu. Ne restent que l'église et sa tourelle contenant l'escalier à vis qui monte au clocher. La légende raconte que la pierre creusée à proximité porte encore les traces du supplice infligé à Hermana. Toutefois, en cas de mal de ventre, il suffirait de sauter neuf fois par-dessus pour en être guéri…
Sainte-Germaine est fêtée tous les ans à jour fixe. Un repas est préparé sur place par des bénévoles et servi aux fidèles après la messe et où sont invités les pèlerins de passage.
Elise Morin
Née en 1978, Elise Morin a été formée à l’enseignement de l’Ecole nationale supérieure des arts décoratifs de Paris, du Central Saint Martins College de Londres, puis de la Tokyo National University of Fine Arts. Elise Morin développe des installations et des vidéos empreintes de références au paysage et à l’industrie. Le rapport au lieu et le mode de production sont des composantes intrinsèques de son travail. Ils engagent une réflexion sur le lien qu’entretient la création au bien commun et sur le rôle de l’esthétique dans la compréhension et la valorisation des pratiques et des espaces. Une approche poétique plus large est basée sur le motif, sur l'utilisation du son et de la lumière.
Sa dernière installation Waste Landscape au Centquatre à Paris renvoie tant à la migration des symboles et des formes qu’à la circulation économique des objets. Son engagement dans la création a été récemment récompensé par l’attribution du prix Solomon R. Guggenheim (EU), The Best of Lab Art and Sustainability 2012. Elise Morin a notamment exposé en France au Centquatre, au Jeu de Paume, au Grand Palais, au Musée d’art contemporain de la ville de Bucarest et au Mori Art Center de Tokyo.
Dans l’église Sainte-Germaine, Elise Morin a choisi de porter son attention sur le caquetoire, sorte d’auvent semi-ouvert et entouré de hauts murs laissant penser qu’autrefois une charpente le couvrait entièrement.
Grâce à plus de 300 tambours à broder recouverts de tulle de couleurs différentes (reprenant les couleurs des vitraux de Notre-Dame-de-Chartres), l’installation prend place au-dessous du caquetoire et fonctionne comme un vitrail à ciel ouvert. Les ombres portées des tambours font courir une dentelle sur les hauts murs : la forme prend le dessus sur la couleur. A travers le prisme du jeu de lumière, les tambours colorés deviennent des ombres noires formant un encadrement délicatement dentelé ou dessinant un « Y » sur le mur latéral.
A l’intérieur de l’église, une centaine de tambours plus petits se découvre en sortant, comme une rosace, invitant encore à lever les yeux. La trame composée de quatre losanges en compose un grand, le vide circulant ente les quatre losanges dessine une croix.
Ainsi, l’artiste offre à l’église Sainte-Germaine une nouvelle lumière, parant la sage architecture romane de couleurs et de motifs supplémentaires.